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Blogdescars

Histoire des canuts de Lyon

, 06:30am

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On appelle "canuts" les artisants tisserands spécialisés dans le tissage de la soie à Lyon aux XVIIIème et XIXème siècles.
L'étymologie est controversée, on trouve de nombreuses hypothèses sur le site internet "Métiers d'autrefois" : http://metiers.free.fr/dcanuts/canutsi0.html


Apprentis, compagnons ou maîtres tisseurs, lorsqu'ils sont propriètaires de leur métier à tisser, les canuts travaillent dans le quartier lyonnais de la Croix-Rousse ("la colline qui travaille", en référence à Fourvière "la colline qui prie"), classé au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1999.

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Le développement du tissage à Lyon et l'arrivée des métiers à tisser de grande taille, type "jacquard" rend nécessaire une nouvelle extension urbaine.

Au Nord le quartier de la Croix-Rousse dispensé de taxe et protégé des inondations sera choisi pour la construction d'immeubles sobres mais bien adaptés au travail de la soie : plafonds très hauts et vaste fenêtre offrant un éclairage maximum tout au long d'une journée de travail.


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Le métier à bras de type "Jacquard" modernise le travail des artisants canuts à partir de 1801. Il doit son nom à son inventeur, le lyonnais Joseph Marie Jacquard.
L'innovation se traduit par l'utilisation des cartes perforées :


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Le travail est automatisé. Un seul canut suffit à présent à manipuler le métier à tisser :

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C'est un avantage car le travail des enfants devient inutile. Mais les canuts déplorent aussi la disparition d'une partie des emplois offerts. Leur condition est précaire, sensible aux fluctuations de la vie politique et économique. Le marché de la soie est restreint. La production de tissus luxueux et de broderies est destinée à l'ameublement des riches demeures :

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à l'église :
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et à l'armée :
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Pour faire face à leurs rudes conditions de vie et de travail, les canuts créent dès 1825 des sociétés de secours mutuels, ancêtres de l'assurance maladie, de l'allocation chômage et de la retraite. Ce mutuellisme est basé sur le principe de la cotisation et de la redistribution.
Ils tentent de rendre plus équitable le conseil des prud'hommes en demandant la parité entre "négociants" (employeurs) et tisseurs (salariés).
Ils sont, en 1834, à l'initiative de la première "coopérative française de consommation". Il s'agit là de mutualiser l'achat des biens de consommation courants (alimentation, vêtements, ...) pour bénéficier de prix de gros.
Ils publient enfin à partir de 1831, le premier journal ouvrier "L'écho de la fabrique", consultable aujourd'hui sur internet :
http://echo-fabrique.ens-lsh.fr/
"L'écho de la Fabrique" sera publié de 1831 jusqu'à l'insurrection de 1834. Interdit, il est remplacé en 1835 par "L'Indicateur"puis par "Le Nouvel écho de la Fabrique" publié en 1835 qui ne fera l'objet que d'un seul numéro.

Une équipe dissidente fonde en 1833 "L'écho des travailleurs", publié jusqu'en 1834. Il est remplacé par "La Tribune prolétaire" en 1834 et 1835. Avant de devenir "L'Union des travailleurs" en 1835.

Ces journaux seront définitivement interdits en 1835.
Les canuts ont grandement contribué à organiser le monde ouvrier. Par leur travail, leurs idées mais aussi par la lutte.
La révolte des canuts s'inscrit dans une période troublée de l'histoire de France, avec la fin de l'épopée napoléonienne (1815), le sacre de Charles X "Roi de France" (1825), l'abdication de Louis Philippe "Roi des Français" et la proclamation de la seconde République (1848).
Pour faire entendre leurs revendications et améliorer leurs conditions de vie et de travail sur fond d'instabilité politique et de crise économique les canuts lyonnais se révoltent en 1831, 1834, 1848, et 1849. "Vivre libre en travaillant, ou mourir en combattant" sera leur cri de ralliement.

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La seconde République apaise les tensions. Mais l'utilisation des métiers mécaniques (1850) regroupés en usine, combinée à l'invention de la soie artificielle, en faisant entrer le tissage dans l'ère industrielle met fin aux pratiques artisanales des canuts lyonnais.

 

 N. Navarro. Documentaliste LP Emile Béjuit.